Il était huit heures. Trois feuilles gribouillées entachées de café couronnaient un petit déjeuner à peine entamé. La session d’examen avait bel et bien commencé et vous vous apprêtiez, plein d’appréhension, à passer ce premier examen tant redouté. Une seule obsession : est-ce qu’il va poser une question sur le 2e chapitre?

   Il est huit heures. Une petite toux, un vieux mal de tête, vous n’avez pas l’air plus en forme que le wifi de votre voisin dont vous avez craqué la clef. Pas le temps pour le petit déjeuner et pour couronner le tout, le café est froid. Vous retrouvez le bon mail, vous testez le lien, et vous vous trompez de mot de passe. L’angoisse monte. La session a bel et bien commencé et plus que jamais, vous redoutez ce premier examen. L’ordi a planté, vous n’avez même pas encore pensé aux questions.

   Deux situations qui dépeignent un même phénomène : les étudiants ont entamé leur période d’examen au sein de l’enseignement supérieur. Celle-ci est nouvelle et floue à tous points de vue : aucune certitude sur le calendrier de passage, pas de moments d’étude avec les copain.e.s, pas de pause détente post-examen, un déconfinement qui s’étire dans la longueur, pas de job étudiant cet été, et un compte en banque conséquemment à sec. C’est emplis d’appréhension, tant par leur statut d’étudiant·e que de citoyen·ne, que ceux/celles-ci doivent jongler entre cours, famille, cohabitation, solitude et anxiété propre à tout un·e chacun·e. Il est trop tôt pour faire le bilan mais nous pouvons d’ores et déjà nous questionner sur plusieurs points.

   Premièrement, les modalités d’examen. Les solutions d’urgence se sont multipliées : évaluation par visioconférence, plate-forme en ligne, métamorphose en travaux, etc. Ces tests d’alternatives ont commencé sur les chapeaux de roue, de manière parfois hasardeuse. Citons par exemple ces centaines d’étudiant·e·s liégeois·es sans examen faute de plate-forme fonctionnelle et ce, le premier jour de la session. Chaque établissement a ainsi choisi ses propres méthodes, avec plus ou moins de considération pour les réalités de chaque étudiant.e.s. Pour ces dernier.e.s c’est autant de stress et d’inquiétudes et, on le sait, ce ne sont pas des facteurs de réussite. Est-il d’ailleurs tout à fait légitime de leur demander de payer l’entièreté de leur année alors qu’ils et elles n’ont pas eu un enseignement complet? Cette question, ainsi que celle des allocations d’étude, reste en suspend.

   Ensuite, l’intrusivité. Oui, des logiciels anti-triches sont utilisés. Aux vieux relents d’Orwell, nous préférerons penser à de la maladresse mais que cela ne nous empêche pas de poser les bases de ce qui peut et ne doit pas être fait. Est-il choquant de penser à un logiciel espion qui, sans vous avertir, prend sporadiquement des photos de vous pour s’assurer de votre bonne conduite ? Pour nous, oui. Mais c’est pourtant bien le système qu’avait préconisé une de nos universités. D’autres logiciels, moins intrusifs, passent néanmoins par l’usage d’un scanner, ou d’un appareil photo pour vérifier les copies papier. Où est la confiance en l’élève? Peut-être aurions-nous pu profiter de ce moment pour dégager des alternatives aux questions de restitution et envisager plutôt des questions de réflexion, qui ne nécessitent pas de surveillance intrusive d’une personne, mais peut être dans l’alternative.

   Aujourd’hui, nous devons dresser le bilan de cette première session d’examen pour pouvoir proposer une stratégie efficace et opérationnelle pour la seconde session. Un exemple de solution parmi d’autres : ouvrir la possibilité de passer l’examen dans les locaux de l’établissement. Si les initiatives communales, comme celle de notre échevine de la jeunesse à Watermael-Boitsfort mettant à disposition des locaux d’études, sont nécessaires, elles ne peuvent pallier seules aux inégalités d’environnement des étudiant.e.s.

  Aujourd’hui, offrons aux étudiant·e·s clarté et stabilité sur ce qui les attend. L’inégalité des chances quant à la réussite est déjà trop élevée dans notre société : ne laissons pas des étudiant.e.s abandonner ou être mise en échec par les effets collatéraux du coronavirus.

Et pour demain, faisons leur juste confiance.

L’équipe régionale