Ce 1er mai correspond au 45ème jour de confinement. 45 jours que notre pays vit au ralenti, que certain.es télétravaillent sans l’avoir choisi et sans préparation, tandis que d’autres continuent leur travail sur le terrain, parfois à un rythme inhumain et sans toutes les protections nécessaires. 45 jours que nous guettons les chiffres anxiogènes de l’évolution de la crise sanitaire. 45 jours que nous applaudissons le personnel médical, mais aussi le personnel des commerces restés ouverts, les éboueur.euse.s, les facteur.trice.s, etc. Tous ces travailleur.euse.s qui garantissent les services de première utilité. Des travailleur.euse.s dont l’utilité sociale, qui semblait avoir été oubliée par certain.e.s, est mise en lumière comme rarement en cette période de crise. Et pourtant, ces dernières années, l’humain a été relégué au profit de l’économie. Les gouvernements ont ainsi allègrement sabré dans les budgets réservés aux soins de santé, aux services publics et à la Sécurité Sociale.

   Nous n’en sommes pas encore sort.i.es, que déjà certain.es chevalier.es du statu quo nous assènent sans gêne aucune les mêmes préceptes : sérieux budgétaire (qui justifiera sans doute des économies supplémentaires dans nos services publics), flexibilité (des travailleur.euse.s et de leur qualité de vie, cela va sans dire) et télé-travail …

   En ce 1er mai, nous voulons rappeler que le travail peut être une source d’émancipation mais uniquement si les travailleur.euse.s se voient reconnu.e.s dans leur dignité et leur utilité sociale, autant symboliquement que financièrement. Il est crucial de mener une réflexion sur la valeur sociale des emplois afin de revaloriser les secteurs dont nous reconnaissons toute l’indispensabilité et l’utilité, et qui aujourd’hui ne sont pas financés à leur juste valeur. Les agent.es de première ligne ne sont pas des héro.ines, capables de magiquement tout surmonter sans en payer les conséquences. Ils et elles n’ont pas le choix. Ils et elles subissent des choix politiques qui les contraignent et les exposent à des conditions de travail infernales. Traitons-les d’une manière qui les reconnaissent et les respectent : en leur donnant les moyens d’être des travailleur.ses, pas des sacrifié.es.

   La situation actuelle mène aussi beaucoup d’entre nous à expérimenter le télétravail pour la première fois. Nous l’avons dit, cela peut être un privilège de conserver son emploi tout en restant à l’abri. Lorsqu’il est bien défini, le télétravail peut avoir de réels bénéfices tant pour l’employé.e que pour l’employeur.euse. Il peut également avoir un impact positif sur la congestion en ville et les problèmes de pollution. Il peut permettre un meilleur équilibre entre le travail et le temps personnel. Mais s’il est imposé, général et non réfléchi, la souffrance au travail n’est pas loin. En effet, comment s’épanouir lorsque l’on doit travailler tout en gérant les enfants, la pression de l’isolement, avec un matériel inadapté et une installation sans ergonomie, sans oublier la fatigue émotionnelle et cérébrale des réunions virtuelles à répétition, ainsi que la difficile déconnexion ? Nous plaidons donc pour une véritable réflexion entre les divers acteurs sur la possibilité de son implémentation plus large dans le monde du travail belge, tout en définissant un cadre clair et adapté à la réalité des travailleur.euse.s et à la nature de leurs activités.

   Si ce 1er mai est la fête du travail, n’oublions pas cependant ceux.celles qui ne disposent pas d’un emploi et pour qui la situation actuelle rend la recherche d’autant plus difficile. Le gouvernement fédéral libéral n’a eu de cesse de s’attaquer à leurs droits, les culpabilisant toujours plus de leur situation personnelle, les traquant, renforçant l’image du chômeur.euse parresseux.euse, oubliant que le système économique actuel a fait des travailleur.euse.s des ressources et que l’emploi décemment encadré se fait de plus en plus rare. Continuons à nous battre pour que celleux qui se retrouvent au chômage ne subissent pas de discrimination supplémentaire : individualisons et automatisons ces droits!

   S’il s’agit de réinventer le monde, il s’agira aussi de celui du travail. Réfléchissons à un vrai changement de paradigme et des actes politiques qui actent que l’économie et le travail sont des moyens pour la vie et l’épanouissement des humains qui l’habitent. Pas l’inverse. A l’heure où beaucoup trouvent à s’émerveiller de ce que le temps peut avoir à offrir, il est l’heure de repenser les bases. Considérons sérieusement la mise en place d’une réduction collective du temps de travail afin de le redistribuer, et l’instauration d’un revenu de base qui servirait de bouclier social généralisé.

Travaillons mieux pour vivre mieux!

L’équipe régionale